Un roman hors du commun.
C’est en effet un roman hors du commun, d’une écriture époustouflante qui a réussi à allier la qualité extrême à une merveilleuse simplicité. Extrêmement érudit, il se lit pourtant aisément et m’a emportée jusqu’au bout. Il faut dire que l’histoire est prenante qui raconte la fin de vie de John Hubbard Wilson, éminent professeur de littérature, atteint de la maladie d’Alzheimer, et ses retrouvailles avec sa fille Miranda avec laquelle il était brouillé depuis trop longtemps « Un sanglot lui échappe lorsqu’elle repense au noble visage de son père, à ses cheveux devenus blancs, à la drôle d’impression – à la fois étrange et familière – que cela lui a faite de le revoir. » A travers un chassé-croisé entre présent et passé, on apprend tout de sa vie, ses amours et… Shakespeare.
Shakespeare en guise de fil conducteur.
Car, et c’est ce qui est impressionnant, le Grand William est le fil conducteur de ce récit. Sans minimiser l’intérêt de l’histoire de l’amour retrouvé entre un père à la mémoire défaillante et sa fille perdue de vue pendant longtemps, la présence de ce grand dramaturge anglais est un plaisir immense. Le travail d’écriture de l’auteure est grandiose qui mêle si bien ses mots à ceux de l’homme dont le milieu de la littérature et du théâtre a tant parlé. La mémoire embrumée du personnage principal est parfaitement restituée qui passe du réel au virtuel d’une seconde à l’autre. Les sentiments, exacerbés parfois, sont bien retranscrits et la fluidité reste présente tout au long du texte.
Un fabuleux travail de traduction.
Il n’est pas possible par ailleurs de passer sous silence le travail fabuleux de la traductrice, corroboré par sa note en fin de roman qui explique ses choix de traducteurs pour les passages des œuvres de Shakespeare.
Ce roman est remarquable qui allie une étude sur notre relation à ceux qui nous aiment, et, pour reprendre les termes de la quatrième de couverture « sur le sens qu’on donne à sa vie ». Tout au long de ce roman, on s’aperçoit de l’importance de la littérature et de l’aide qu’elle peut apporter.
Editeur : Phébus
Date de Parution : 24 Août 2023
Nombre de pages : 384
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nathalie Bru
Me voilà intriguée par la place de Shakespeare dans ce duo familial. Je note ce titre qui m’a l’air passionnant en effet. Belle année 2024, qu’elle soit toujours aussi riche en lectures et en coups de coeur !
Merci Sacha, belle année à toi aussi, avec beaucoup de belles lectures.
J’ai été époustouflée par la maestria avec laquelle l’auteure enchevêtre les temporalités, les points de vue, la littérature et le quotidien. Bien avant « the father », elle nous fait éprouver la confusion induite par la perte de la mémoire et la disparition des repères. Le travail de la traductrice est exceptionnel. Pour moi le meilleur roman de Jean Hegland à ce jour.