De Königsberg à « Nueva Königsberg »…

Trop accaparée par ma vie professionnelle à l’époque de sa sortie, je n’y avais pas prêté attention. Je ne sais pas davantage l’accueil qui lui fut réservé. Mais, pour ma part, cet ouvrage est loin, très loin de ce que j’ai pu lire ces dernières années. Nous sommes en mai 1946. Le philosophe français Jean-Baptiste Botul – accompagné de Sébastien, un jeune zazou passionné de cinéma – est appelé en consultation au Paraguay près d’une communauté allemande venue de Königsberg pour échapper aux bombes ennemies. Tous ces gens vivent à la manière de Kant et se posent une question essentielle. Doivent-ils aller jusqu’à suivre aussi ses préceptes en matière de sexualité et donc de chasteté ?

Ballade – balade ? – philosophique…

Comment qualifier ce roman ? Je vais emprunter les propos de l’auteur :   

« Des accords graves et solennels qui s’entremêlaient à des trilles espiègles et enjoués. »

Il parle là du magnifique  « Rhapsody in blue » de Gershwin, joué un soir à la clarinette par Sébastien. Mais ces mots s’appliquent parfaitement à l’ouvrage. En plus de cette idée géniale de choisir pour héros un philosophe français tout droit sorti de l’imagination d’un journaliste, en plus de l’intérêt de se replonger dans l’œuvre de Kant, de revisiter Voltaire – Sébastien, n’est-il pas un peu Candide ? – « Nueva Königsberg » est un mélange subtil d’ingrédients de qualité. J’ai adoré la belle écriture, la crudité liée au sexe mêlée à la suavité de l’amour courtois, la drôlerie mélangée à la raison, les réflexions philosophiques

« Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle. »

agrémentées de passages poétiques et romantiques

« Arrivés au bord du lac, ils prirent place sous un saule pleureur que les rayons du soleil couchant habillaient d’or. »

Sans oublier les causeries de Botul et les tergiversations de Sébastien. Tergiversations amoureuses… Pauline, Sofia… L’amour ! Toujours ! Vaste question allègrement traitée. C’est ambitieux, érudit, brillant, dôle et enlevé. Bref, c’est un roman à nul autre pareil, une sorte de farce sucrée-salée, une aventure philosophique, à qui j’ai envie d’attribuer le prix de l’originalité. Je dirais bien que j’en suis tombée amoureuse au premier regard. Mais ce cher Emmanuel – je parle de Kant, naturellement – agréerait-il ? Peut-être, il ne s’agit que d’un roman après tout.

J’appréciais déjà Paul Vacca l’essayiste, ses mots choisis, son immense érudition, son humour ravageur. J’appréciais aussi le chroniqueur et notamment son cabinet des mythologies littéraires dans le magazine Ernest. Je dois avouer que le romancier n’a rien à leur envier.

« Nueva Königsberg », un bonbon acidulé à savourer sans modération.

Editeur : Philippe REY
Date de Parution : 7 Mai 2009
Nombre de pages : 216