Sigolène, un prénom peu commun. Sigolène Vinson, une auteure abordée pour la première fois à Nancy en Septembre 2017. J’avais été impressionnée par son regard franc ombré d’une pointe de tristesse, mais très vite illuminé par les rayons de son sourire. Elle m’avait dédicacé « Courir après les ombres », j’avais acheté « Le caillou » plus tard. Les deux romans attendent toujours sur mes étagères.  Mais cette année, elle était à la Comédie du livre à Montpellier et je l’ai revue, j’ai retrouvé ses yeux et son sourire mais surtout… j’ai rencontré « Maritima », son dernier roman. Un comble pour qui a peur de l’eau… je m’y suis noyée avec délice.

« L’étang de Berre, qui en rêve ? », ce n’est pas moi qui le dis mais l’auteure dans la dédicace de mon exemplaire.

Certes, je l’avoue, je n’avais jamais pensé à une telle destination de vacances. Ce lieu était pour moi synonyme d’usines pétrochimiques, thermiques, de fumées et, j’ose le dire, plutôt de laideur… et pourtant, l’auteure le souligne à merveille, il est aussi un endroit de mer et de garrigue :

« Au-delà du viaduc autoroutier, les usines et la mer. Au-delà de l’étang de Berre, la montagne Sainte-Victoire et la garrigue. »

 Et puis il y a ses muges – inlassablement surveillés par Jessica postée à sa fenêtre, armée d’une paire de jumelles – et son « caviar martégal », la poutargue, ce mets fort prisé.

A la fois politique, sociologique (je l’ai vu classé en littérature/sciences humaines), voire touristique, le roman oscille entre l’eau et l’industrie, le rose pâle et un camaïeu de gris, la tristesse, de grands malheurs et quelques petits bonheurs. Il ne se raconte pas, il se vit, à petits pas, en retenant son souffle comme vivent les personnages, Jessica, Sébastien, Ahmed, Antoine, Dylan, Emile, Joseph… Cabossés par la vie, ils possèdent tous un côté attachant, de celui qui donne envie de les prendre dans nos bras, de les aimer, de les consoler. Drôles parfois, souvent tristes, ils mènent la plupart du temps une vie de galère sans pour autant rêver d’autre chose.

J’ai aimé l’écriture de Sigolène Vinson vraiment belle, de ces écritures qui sans chercher à en mettre plein la vue, parviennent par leur élégance, leur fluidité, leur naturel, à faire pousser les plus belles fleurs sur un tas de fumier.

« Le mistral de décembre balayait les papiers gras dans les rues de la cité, tous ces déchets échappés des sacs poubelles éventrés par les mouettes et les goélands qui avaient oublié qu’ils étaient mangeurs de poissons, chassait les nuages et la pluie, rendait à la vue ce qui avait été caché, la Sainte-Victoire et les couleurs des peintres. »

Et last but not least, je me suis régalée des leçons sur les muges et des extraits de livres érudits trouvés par Antoine dans la boîte à livres, véritables respirations, sans compter les expressions locales dont je suis friande.

Un magnifique roman, superbement écrit.

Editeur : L’Observatoire
Date de Parution : 6 Mars 2019
Nombre de pages : 304