Ce roman se déguste qui raconte l’enfance de sa mère, c’est l’auteur qui le dit en note préalable.

La petite Marie est recueillie par Anne-Angèle. Nous sommes en 1944 et cette dernière se rend à Paris en provenance du Maroc où elle était infirmière. Elle a, en effet, été informée de l’accident grave dont sa sœur Mathilde vient d’être victime dans la capitale. Elle est d’ailleurs décédée à son arrivée. Il me semble que vous en dévoiler plus, ne serait-ce que par bribes, nuirait à l’intérêt de cet ouvrage magnifique. Car le plaisir grandit ligne après ligne, mot après mot, miette après miette, devrais-je dire, doucement.

L’auteur a ce don de transformer un récit pourtant triste en un conte où les méchants ne sont jamais tout à fait méchants et les gentils parfois malveillants. L’histoire est racontée avec beaucoup de tendresse, un amour pudique, une grande bienveillance. Il faut dire que cette petite fille, élevée dans un village à la fin de la guerre avec toutes les ignominies que cela implique est particulièrement attachante. J’ai tout de suite eu envie de l’aimer, de l’entourer, de la protéger. Tous ses actes sont dictés par le besoin, le besoin de manger, le besoin de se faire pardonner, le besoin de sauver sa « tante » Anne-Angèle. Elle ne réfléchit pas. Pour elle, pas de différence entre Allemands et Français, pas de jugement, pas de regrets. Elle avance dans sa vie difficile avec une maturité et un courage confondants. Elle est intelligente, perspicace, courageuse, émouvante.

J’ai aimé l’empathie dont l’auteur fait preuve à l’égard de ses personnages, tous ses personnages.

Jamais je n’ai senti de sa part quelconque jugement. J’ai aimé la construction linéaire de ce roman qui suit Marie tout au long de la fin de cette deuxième guerre mondiale dans un village français comme il en existe tant, avec ses travers mesquins. J’ai aimé le talent de peintre de Philippe Pollet-Villard qui décrit la forêt comme personne. J’ai aimé le phrasé, le ton employé tout en douceur. J’ai aimé le rythme qui s’accélère vers la fin en un véritable suspens avant de retrouver dans les ultimes phrases le silence et la sérénité. J’ai aimé les dernières lignes qui laissent espérer un avenir meilleur

« Alors Marie renonce, ralentit, recule, prend le chemin inverse et se dirige vers la sortie du village. A l’opposé. Elle se dit que cet endroit est peut-être un avant-goût du paradis, qui fait chambre commune avec l’enfer. »

J’ai enfin aimé le titre dont on apprend le sens tardivement. Et je l’aime encore davantage dans la langue de Goëthe.

 

Editeur : Flammarion
Date de parution : 23 Août 2017
Npmbre de pages : 432