Avis : ★★★★★

Voilà un petit moment que je n’avais lu de premier roman.

« Le matin est un tigre » de Constance Joly est, je pense, le premier d’une nouvelle longue série, et quel premier ! Pour un coup d’essai, c’est un véritable coup de maître, un roman de ceux dont on garde longtemps la trace, le souvenir, les mots gravés en soi.

C’est de l’écriture dont je souhaite tout de suite parler. Une écriture imagée, maîtrisée, poétique qui, loin de dissimuler le fond sous une couche de maquillage grossier, le sublime à merveille. Elle laisse joliment entrevoir la beauté des idées, la sensibilité du propos, les particularités des personnages. Elle entoure de soie douce les moments les plus graves, sèche les larmes qui affleurent, éclaire le regard porté sur la souffrance.

« C’est un jour blanc, éreinté, qui n’a envie de rien. Un matin à mettre du bois dans le poêle, et à se recoucher immédiatement. »

Ainsi commence le récit qui va nous plonger dans l’intimité d’une famille : Alma, la maman, Jean, le papa et Billie, leur fille adolescente, celle autour de laquelle le roman se construit. Car Billie est malade et s’étiole chaque jour davantage. Elle souffre d’un mal dont on ne connaît pas grand-chose, qui résiste aux traitements, qui modifie la vie de ceux qui vivent autour car « On n’entre pas facilement dans le malheur des autres, il est comme un bois sombre, une terre dévastée et lointaine pleine des grincements de la nuit. »

L’auteure nous raconte Alma et Billie, Billie et Alma, avec Jean en guest star. Elle nous raconte les liens indéfectibles entre mère et fille, liens forts s’il en est mais peut-être destructeurs. Alma ne croit pas à la tumeur que les médecins veulent opérer, non, elle y voit une histoire de chardon, un chardon qui pousserait à l’intérieur du corps de sa fille. Tout est image décidément dans cet ouvrage telles les valises de plus en plus lourdes portées par Alma, valises pleines de ses propres problèmes.

Constance Joly réalise un magnifique ouvrage sur la transmission générationnelle, ces petites ou grandes choses, ces secrets, ces malheurs des parents dont les enfants s’emparent sans même le savoir. Elle nous fait découvrir un monde aux allures de rêve, où chaque objet est un signe. Un premier roman vraiment très réussi.

J’ajouterai un bon point pour le bandeau de couverture à la fois superbe et mystérieux, comme le titre du livre.

Editeur : Flammarion
Date de Parution : 9 Janvier 2019
Nombre de pages : 158

Ce roman a été lu dans le cadre de l’association « Les 68 Premières fois » : Session Janvier 2019.