Profondément émue…

Profondément émue par l’histoire, par la vie de ces femmes Malawites soumises à leurs maris et reléguées aux seules tâches ménagères, éducation des enfants et portage de l’eau chaque jour. Elia en fait partie de ces filles qui chaque matin s’en vont par les chemins poussiéreux. Affublée de bidons dont le bruit scande ses pas elle marche ainsi jusqu’au marigot où elle retrouve ses congénères. Elia ne veut pas de cette vie-là. Elle veut aller à l’école comme ses frères. Hélas, son destin est scellé depuis que, pour la première fois, du sang a coulé entre ses cuisses.

Profondément émue par cette coutume ancestrale qu’est le Kusasa fumbi, rite sexuel de défloration d’une jeune fille vierge par un homme appelé hyène. Dans un camp aménagé sur une île loin de tout, camp pompeusement appelé « CAMP DE VACANCES POUR JEUNES FILLES », les familles confient leurs filles à Tafadzwa, une vieille, pour leur préparation à la vie maritale.

Profondément émue aussi par Ladarius, ce fusi, cet homme-hyène, que l’on pourrait imaginer heureux d’entrer en relation avec pléthore de jeunes filles vierges et d’en faire des femmes. Mais finalement, il n’est rien, privé d’amour et devant vivre caché, sorte de paria que chacun évite. Car d’amour, il n’en est pas question : une nuit, juste une nuit pour accomplir son travail, son méfait ? Un métier, juste un métier, bien rémunéré certes, mais un métier qui fait de lui un homme à part. Ladarius, un coupable aux allures de victime…

Totalement éblouie…

Profondément émue et totalement éblouie. Totalement éblouie pas l’écriture de l’auteure qui nous narre des faits réels à la manière d’un conte, une écriture particulièrement travaillée, aux allures de poème, une écriture imagée et d’une grande élégance teintée parfois d’une pointe de malice. Fabienne Juhel n’a pas son pareil, en effet, pour nous parler de sexe

« J’ai senti qu’elle m’en voulait. Comme si elle m’avait catalogué, qu’elle avait compris que ça ne nous amusait pas d’emballer notre canne à sucre avec de la cellophane à chaque fois que nous prenait une envie de baiser. »

Elle a de la même façon un talent particulier qui décrit la beauté de la nature, des arbres, de la faune et de la flore, le rire des hyènes et le chant des oiseaux.

Entre bien et mal, beauté et horreur ce roman est absolument grandiose.

Editeur : Le Rouergue (Collection La brune)
Date de Parution : 6 Octobre 2021
Nombre de pages : 208