Elégance…

S’il m’était demandé un seul mot pour qualifier cet ouvrage, je choisirais : élégance. Tout, dans ces cent vingt pages l’est. L’écriture est d’une grande délicatesse, faite de mots bien choisis, de phrases parfaitement agencées, de rythme lent et régulier. Tout est élégance dans la contemplation du monde qui entoure les personnages. Les paysages qu’ils découvrent sont dits avec simplicité, diversité, beauté :

« Nous partons de nuit. Le ciel étoilé parsème au-dessus de nos têtes ses poussières d’éternité. »

Les lieux familiers qu’ils ont habités sont décrits avec nostalgie, précision, amour :

« Dans la cuisine, une table de ferme, au bois meurtri par les tranchants du couteau et les bords des casseroles fumantes, mille fois lavé à l’eau savonneuse. »

Erudition…

Mais au-delà ce cette grâce, le récit recèle des trésors d’érudition. C’est, sous le couvert d’une magnifique histoire d’amour entre le héros et la jeune Elka, fille d’un chef de guerre rebelle, l’histoire de la Russie qui revient dans les propos de l’auteur. Cette fois, il nous fait découvrir les Tcherkesses – ou Circassiens –un peuple du nord-ouest du Caucase. C’est par amour et aussi horrifié par l’attitude des Russes à leur égard que le jeune officier prendra fait et cause pour cette nation.

J’ai beaucoup aimé le mélange entre amour et Histoire, et les différents sentiments qui tout au long du récit sont restitués avec justesse. J’ai ressenti comme miennes la joie parfois, mais plus souvent la lassitude, la vénération, la solitude aussi. Et j’ai suivi avec angoisse les multiples péripéties d’Alexis jusque dans la passe de Darial et son retour vers un triste destin. Heureusement la fin arrive, une fin lumineuse et digne d’un conte. Car si Jean d’Albis est à mes yeux un historien grand connaisseur et, j’ose le dire, amoureux de la Russie et de son peuple pour en parler ainsi, il est aussi un formidable conteur.

Un roman dont les faits se déroulent en 1864, mais la transposition en 2022 est tentante.

Editeur : Vibration Editions
Date de Parution : 1er  septembre 2022
Nombre de pages : 120

J’ajoute un bon point pour la jolie couverture élégante – elle aussi – le très beau marque-page à découper et la préface de Pierre Morel, ancien ambassadeur de France à Moscou.

Et je remercie très chaleureusement l’auteur pour cette belle lecture enrichissante.