Edouard et Marie… Edouard, brûlé, défiguré, fait de hurlements intérieurs, blessé par les regards portés sur lui, regards de peur, de dégoût, d’horreur. Marie, petite fille d’à peine 10 ans dansante, virevoltante, chantante… Ils se croisent et les yeux de Marie portés sur Edouard se teintent d’un sourire… il n’en fallait pas plus pour que l’amour naisse chez cet homme anéanti, un amour malade, un amour fou au sens premier du terme.

A partir de là l’auteur va nous emmener dans un tourbillon d’horreurs car oui, pour magnifique qu’il soit grâce à une écriture vive et d’une grande poésie, où les mots tapent, se cognent, ce roman m’a bouleversée et parfois obligée à fermer les yeux, à cesser ma lecture pour reprendre mon souffle.

Le roman est magnifiquement construit qui alterne les propos de Marie et ceux d’Edouard, puis des parents de Marie, le tout parsemé des commentaires de jeunes filles enlevées par les hommes de Boko Haram ou encore des femmes yézidies séquestrées et violées par les membres de l’Etat Islamique en Irak. Ce roman est un cri de souffrance qui émane de toutes ces femmes violentées, captives, et qui pourtant, toutes, trouvent en elles une forme de survie, acceptent même l’éventuelle ambivalence de sentiments éprouvés envers leurs geôliers.

J’ai aimé cette universalité dans le récit qui fait toute la place à la douleur une et plurielle, qui rassemble ces femmes de tous horizons.

Leur cri intérieur s’entend au-delà de leurs propres frontières et nous traverse « Quelle divinité mettons-nous en colère pour qu’elle s’acharne ainsi ? De quels rouages sommes-nous le grain de sable ? Quelle faute nous fait-on payer depuis la nuit des temps ? ».

J’ai aimé cette force, cette capacité à tirer le meilleur d’elle-même, à déposer les armes pour mieux se retrouver. J’ai aimé le talent de l’auteur capable de me transporter à l’intérieur de la chambre isolée ou Marie ne trouve pour seul refuge que les livres apportés par son ravisseur, d’avoir peur, mais aussi de combattre et d’espérer…. Même si l’espoir…

A partir d’un fait unique, Carole Zalberg a réalisé un plaidoyer brillant en faveur des femmes qui subissent des violences.

Ses propos résonneront longtemps en moi et je ne sais quand je me remettrai de ces coups de mots reçus en plein cœur.

Editeur : Grasset
Date de parution : 1er Févrire 2017
Nombre de pages : 162