Des petits riens qui font un grand roman…
J’aurais envie de dire que l’auteur a l’art d’écrire un grand roman à partir de petits riens. En effet, reconnaissons le, l’histoire n’a rien d’extraordinaire qui raconte la vie d’Hélène et Christophe, deux quadragénaires, qui vivaient, jeunes, dans la région d’Epinal. Hélène, excellente élève, est partie, a fait de brillantes études et occupe un poste de consultante dans une société. Désormais, elle vit à nouveau « dans le coin ». Christophe, lui, n’a jamais quitté leur petite ville natale, un vrai bled, menant une vie restreinte entre copains et fêtes, sans grande ambition. Aujourd’hui il vend de la nourriture pour chiens et va se remettre au hockey sur glace, sport dans lequel il excellait. Ils ne sont réellement heureux ni l’un, ni l’autre…
Un étude sur le mitan de la vie…
Cet ouvrage, où les chapitres alternent entre présent et passé, est une étude sur le mitan de la vie, cette période où les questions affluent, les regrets, les envies d’autre chose. C’est une regard tendre porté sur des personnages banals, des gens de tous les jours. Hélène est déçue après être pourtant parvenue à faire ce qu’elle souhaitait, changer de milieu, occuper une bonne place. Christophe, lui, qui a presque tout raté, est persuadé qu’il peut encore réussir. C’est aussi une histoire d’amour par-delà les différences.
Les petits gestes du quotidien décortiqués…
L’auteur s’emploie à tout peindre, tout fouiller des petits gestes quotidiens, tout rapporter dans les moindres détails. Son don d’observation ressort des descriptions
« …une grande bringue à l’air matinal, ultra-mince, jean moulant et mocassins à pampilles, une frange évidemment et ce long faciès où des dents de pouliche, éclatantes et presque toujours à découvert, aveuglaient par intermittence. »
Il s’attache aux gestes les plus discrets, aux bruits les plus insignifiants, aux personnages les plus ordinaires. Et je m’y suis attachée, moi aussi, à ces gens, ne perdant pas une seule miette de cette belle écriture dont la simplicité n’a d’égal que les émotions qu’elle procure
« L’adolescence est un assassinat prémédité de longue date et le cadavre de leur famille gît déjà sur le bord du chemin. »
Peut-être parce que j’ai vécu plusieurs années en Lorraine, peut-être parce que j’ai côtoyé les personnages de ses romans, peut-être parce que je suis, moi aussi, issue d’une famille modeste, je me sens chez moi dans les lignes des romans de Nicolas Mathieu. Et celui-ci, autant que le précédent, est à mes yeux :
Editeur : Actes Sud
Date de Parution : 2 Février 2022
Nombre de Pages : 400
Autres ouvrages de l’auteur chroniqués sur ce site :
« Leurs enfants après eux » publié par les Editions Actes Sud et Prix Goncourt 2018
« Rose Royal », nouvelle publiée par les Editions In 8 en 2019