S’agit-il d’un roman, d’un documentaire, d’une biographie ? A priori ça ne paraît pas compliqué et pourtant. Une biographie, n’est-elle pas quelque peu romancée lorsque l’auteur y ajoute un petit quelque chose de personnel ? Un roman qui comporte nombre de faits historiques réels, ne peut-il ressembler à un documentaire ? La question pourrait se poser pour « Les Bourgeois », même si la mention « roman » figure sur la couverture.
Et bien non, ce n’est pas ça. Bourgeois est le patronyme d’une famille… de bourgeois catholiques. L’histoire débute le 9 novembre 2013, jour du décès brutal de Jérôme à l’âge de quatre-vingts ans. Jérôme fait partie des dix enfants, huit garçons et deux filles de cette dynastie, pourrait-on dire. Comme souvent dans cette couche sociale ils sont tous dans l’armée, la marine, ont fait des études de médecine, de droit ou encore sont dans les affaires.
Il s’agit presque d’un journal, chaque petite partie commençant par une date, mais un journal complètement démantelé et rassemblé à la va vite, sans ordre. Il n’y a là aucune chronologie, les dates sautant du coq à l’âne, enfin, je veux dire du présent au passé pour mieux revenir au présent via un passé plus proche. Vous suivez ? J’espère, car il faut parfois s’accrocher pour savoir où l’on en est, et, de notre époque, se retrouver en 1919 puis revenir à 2013 après avoir fait un crochet par la guerre d’Algérie (1956) ou encore le 8 novembre 1942, date à laquelle « …les Américains et les Anglais débarquaient en Afrique du Nord. » Bref, tout autant qu’une saga familiale il s’agit d’un balayage historique. De la petite histoire, mêlée à la grande, nous partageons pratiquement cent ans de hauts et de bas, de drames nationaux voire mondiaux, mais aussi personnels. L’auteure ne juge rien des faits et gestes de ces Bourgeois, ni de leurs idées. On ne ressent pas davantage de sa part quelconque empathie, elle qui joue presque plus à l’entomologiste qu’à la romancière.
J’avoue avoir été très intéressée par cette manière de présenter plus d’un siècle d’histoire à l’aune de la vie d’une famille, de ses avis, de ses ressentis. Quant à l’écriture je dirais qu’elle est précise, classique, pleine de finesse. Le vocabulaire extrêmement bien choisi apporte au texte une grande fluidité et beaucoup de caractère .
Editeurs : Actes sud
Date de Parution : 16 Août 2017
Nombre de pages : 368
Merci Geneviève pour cette belle chronique qui me donne envie ++++ de lire ce roman de Alice Ferney surtout que je découvre sa superbe écriture avec « Dans la guerre ».
Encore bravo pour ce blog, je suis toujours enchantée de pouvoir lire tes passionnantes critiques.
à +
Florence
Merci Florence, oui j’avais vu que tu lisais « Dans la guerre », que je ne connais pas. Les Bourgeois est le premier que je lis de cette romancière. Vraiment intéressant malgré un bémol lié aux méli-mélo incessant des dates. Mieux vaut être très attentif.