Véritable plaisir de lecture.

Tout y est dans cet ouvrage pour le plaisir de la lectrice que je suis. L’histoire : le décès, dans un accident d’avion, quelques jours après leur mariage, de l’oncle d’Alice, la narratrice, et de sa jeune femme Yvonne, et la chappe de plomb qui s’est déposée sur cet événement. La construction : entre passé et présent, entre recherches et rencontres de témoins, entre espoir et déceptions. L’écriture : multiple, magnifiquement travaillée, élégante et fluide et puis subrepticement plus nerveuse, syncopée qui traduit à merveille les sentiments, la peur, la déconvenue. Et le décor : la Bretagne, la mer, Groix et le Morbihan, Guidel, Le Guilvinec, et les noms qui sonnent, qui me parlent tant, Le Gall, Le Guen et Traoudec.

Autofiction à la portée universelle.

Bien sûr ce récit a des allures d’autofiction, mais il a une telle dimension universelle qu’on en oublie le côté personnel. Sophie Berger parle à merveille des secrets de famille qui rejaillissent sur la génération suivante, empoisonnent les enfants et encore après eux les petits-enfants. Elle parle avec une infinie délicatesse du deuil et du silence qui le recouvre très souvent. Elle décortique, mêle les sons au calme, étudie, réfléchit et explique par la voix d’Alice :

« Tout m’apparaît enfin. Je reprends pied dans mon vertige. Cette histoire m’a forgée. Il y a tant de choses que je n’ai jamais pu expliquer dans mon comportement. Mon goût immodéré pour le secret découvre enfin sa racine. J’ai baigné dedans depuis l’enfance. »

Oui, la parole apaise.

Un premier roman émouvant et fort. Une réussite grandiose.