Magnifiques, l’histoire, l’écriture, l’art de la narration…
Magnifiques aussi sont l’histoire, l’écriture, la manière de raconter. Comme dans son précédent roman « Celles qui se taisent », l’auteur excelle dans l’art de parler des choses de la vie, même des plus difficiles, avec délicatesse et sensibilité. C’est ainsi que les pages défilent sans à-coups, au gré de mots choisis et de phrases simplement construites. La fluidité s’en ressent et le texte s’écoule comme l’eau d’une source tranquille. Nulle envie de poser l’ouvrage. Comme une pelote se déroule, une page se tourne, puis la suivante et encore une autre jusqu’à la fin, ce moment magique qui voit une
« une oie des neiges [qui] déploie ses ailes. »
Dans ce nouvel opus, nous rencontrons Noémie, en prison, sa petite Lili prise en charge par son grand-père maternel. A sa sortie, Noémie n’hésite pas à compléter son maigre salaire de pompiste par des activités illicites mais rémunératrices. Quand Helyette, son arrière-grand-mère, lui parle d’héritage, il est évident que la jeune femme parvient à mettre de côté son aversion pour les personnes âgées – pour ne pas dire les vieux – et se rend à la maison de retraite. Le reste, vous le découvrirez, comme moi, au fil de la lecture. Bénédicte Rousset s’empare d’un fait divers tragique vieux de presque cent vingt ans pour raconter l’histoire d’une vie. Elle y glisse, par petites touches discrètes, des réflexions sur les travers de la société :
« Avoir prime sur Être. Pourquoi je me trouve plus importante dans un jeans neuf, griffé ? La société est ainsi faite : on mesure un homme à son savoir, puis il est jugé sur son Avoir. »
Elle aborde divers sujets, l’homosexualité, les relations familiales, sociales, la difficulté à se comprendre, avec une infinie douceur et beaucoup d’indulgence. Elle nous parle aussi du droit à l’erreur et de ce cheminement nécessaire pour trouver la sortie et prendre un autre chemin. Et si la couverture fait, naturellement, référence à l’avenir de Noémie, elle est une belle illustration de sa manière de vivre et de son attachement à ce qu’il y a de plus précieux : la liberté.
« A toutes celles que tu es », un nouvel ouvrage captivant, émouvant, remuant de Bénédicte Rousset. Le lire, c’est à la fois prendre du plaisir et s’interroger sur ses propres faiblesses.
Editeur : La Trace
Date de parution : 14 Avril 2022
Nombre de pages : 210 pages
Je remercie infiniment l’auteure et les Editions La trace pour cette lecture particulièrement enthousiasmante.