Mise sous apnée…
L’écriture de l’auteur est à l’opposé de ce que j’aime. Le texte composé de phrases longues, très longues, de redondances parfois alambiquées, de participes présents exagérément utilisés avait tout pour me repousser et pourtant…Pourtant, je m’y suis noyée au point de ne pouvoir respirer, au point de ne pouvoir revenir en arrière, au point de ne pouvoir arrêter cette lecture. Je me suis sentie enchaînée, mise sous apnée, complètement asservie.
L’histoire semble pourtant simple qui raconte une Laura, vingt ans, revenue dans sa ville après quelques années passées à Rennes à exercer de petits boulots et poser – nue – pour des magazines. Le père de Laura, Max Le Corre, ancien boxeur est devenu le chauffeur du maire. Il le doit à Franck Bellec, son ancien agent, désormais patron du casino et homme de mains du maire. Max Le Corre sollicite l’aide de Quentin Le Bars, le maire, pour trouver un logement à Laura. La machine est en marche. Car il s’agit bien d’une machine qui va, l’air de rien, tout détruire sur son passage.
Un énorme talent…
Le talent de l’auteur est énorme qui nous fait ressentir, comprendre, vivre, juste par des mots – ceux de la jeune femme, prononcés lors de son audition et ceux du maire sous forme de sous-entendus – le contour de cette zone particulière que l’on appelle grise. Pas de violence de la part de l’homme, pas de réaction de la femme, une forme d’acceptation qui n’en est pas une. Un service rendu – ou pas, d’ailleurs – pour un autre. Mais un service rendu par plus fort, une nouvelle forme de lutte des classes ou ce dernier exerce, sans en avoir l’air, son emprise sur le plus faible et attend d’être payé en retour.
J’ai trouvé ce roman particulièrement intéressant dans cette manière qu’il a de traiter, mine de rien, les rapports de maître à esclave, avec en filigrane les problèmes de passe-droit, les silences des uns, les yeux détournés des autres. Il est d’une force incroyable et restera longtemps présent.
Editeur : Editions de Minuit
Date de Parution : 2 septembre 2021
Nombre de pages : 176
Merci pour ce bel enthousiasme. Je n’ai jamais lu cet auteur, il serait temps…
Merci à vous…
Tu es convaincante. De plus, j’aime beaucoup les écrits de Tanguy Biel.
Je le lirai aussitôt que possible.
Ma chère Mireille, je suis, en effet, personnellement sous le charme de ce roman, ce qui n’est pas le cas de tou(te)s !
Oui, les question de passe-droit, du droit de cuissage sont bien décrits et ce sont les faibles, les petits qui trinquent
Une critique qui donne envie, d’autant que j’aime souvent les choix de cette maison d’édition. Je ne connais pas cet auteur, l’aborder par le biais de ce livre me paraît une belle opportunité. Merci!
J’avais lu seulement Paris Brest, tu me donnes envie ;).
Et moi, je n’ai pas lu Paris-Brest, ni Article 353 du code pénal dont on parle beaucoup… mais « La fille qu’on appelle » m’a complètement envoûtée.
Excuse-moi, Zazy, pour cette réponse tardive, mais je ne sais pourquoi tes commentaires partent toujours dans les indésirables. Nous sommes d’accord sur la manière, très forte, de traiter le sujet, en effet.