Quand un enfant prend son envol…
« Deux heures du matin, un soir d’été, je suis une mère abandonnée. »
Par petits chapitres, comme on feuillette un album de photos, la narratrice, la mère, va remonter le temps, raconter son mariage, sa grossesse, la naissance de son enfant, la fin de son couple, sa vie de maman « solo » et le départ du fils adoré. Les premières pages m’ont laissé craindre un récit personnel, trop personnel. J’ai envisagé un récit intime, trop intime, sans intérêt universel. Et pourtant, très rapidement je me suis laissée emporter par les mots de l’auteure, le rythme enlevé, sa belle écriture.
En réalité j’ai trouvé dans cet ouvrage un peu de ma propre vie. A travers les réflexions de cette maman « solo », même si je ne l’ai pas été, j’ai eu l’impression d’entendre les miennes. Cette peur de perdre son enfant, cette douleur à le laisser s’envoler, cette envie de le voir heureux mais en même temps l’anxiété d’assister à ses dérapages, cette inquiétude de ne plus être aimé(e), quelle mère ne les a pas vécues ? La narratrice, en parlant de ses propres angoisses, dit en réalité celle de toutes les autres mamans, solo ou non.
« J’ai besoin que tu m’aimes… »
« J’ai besoin que tu m’aimes. Et je ne réalise pas qu’on ne peut éduquer un enfant lorsqu’on a peur de perdre son amour. »
Voilà, tout est dit de cette crainte éternelle de perdre son enfant. La langue, très belle, émouvante, superbement travaillée, donne un rythme, une fluidité qui rendent la lecture enlevée et pourtant facile. Moi, la maniaque de la ponctuation, j’en suis même arrivée à aimer ces appositions de mots qui ajoutent à l’emprise du texte :
« Le jour se lève et je suis seule. Sans devoir de soigner veiller éduquer cultiver cuisiner habiller réveiller anticiper expliquer imposer limiter gronder. »
J’ai eu l’impression d’être entraînée dans un tourbillon de sentiments profonds. L’amour et la tendresse affluent au détour de chaque ligne, telles des vagues submersibles qui m’ont envahie me laissant parfois au bord des larmes. J’ai aimé ce texte magnifique, la délicatesse de l’auteure totalement en harmonie avec les émotions qu’elle aborde, la luminosité et la sincérité qui se dégagent de ses propos.
Editeur : Le Passage
Date de Parution : 7 Janvier 2021
Nombre de pages : 217
Je remercie chaleureusement les Editions Le Passage pour cette lecture en avant-première.
Quand l’intime touche l’universel, une lumière s’allume dans bien des coeurs. En tant que père, j’ai vécu et vis encore cette tension entre protection et liberté de vol. « Nos enfants ne sont pas nos enfants… » mais si, quand même un peu! Un beau billet sur un sujet sensible qui peut toucher tout le monde.
Magnifiquement dit, François ! C’est tout à fait ça.