Avis : ★★★★★
Il y a d’abord cette très belle couverture qui a accroché mon regard : une jeune femme à la peau laiteuse, à la chevelure flamboyante et robe écarlate, bras croisés, tête penchée et pieds dans les herbes folles. Et puis cette porte en bois vieux aux gonds rouillés qui laisse imaginer des tas de secrets enfouis derrière…
Et j’ai tourné la première, puis une page, puis l’autre, encore une et suis arrivée au prologue de « Ce qui nous revient », dernier roman de Corinne Royer et là, je me suis plongée dans une histoire à la fois belle et triste, vraie et romancée et surtout écrite d’une plume sublime.
Louisa Gorki a 10 ans. Sa maman, Elena, grande chanteuse, la quitte pour trois jours, pour un récital dit-elle, mais ne revient jamais. La petite fille grandit aux côtés de son père Nicolaï Gorki, dans le chagrin de l’absence et ce n’est que plus tard qu’elle apprend les raisons pour lesquelles Elena n’est pas revenue. Sur fond de fiction, l’auteur écrit parallèlement l’histoire d’une chercheuse spoliée de sa découverte, en 1958, du chromosome surnuméraire de la trisomie 21, car Marthe Gauthier existe bel et bien. Le roman est parfaitement mené qui présente des personnages fantasques et attachants et nous promène dans leur vie passant allègrement de l’un à l’autre dans de fréquents retours en arrière enchanteurs. Il y est question de sentiments avec pudeur et plus d’idée de revanche que de vengeance.
Mais ce qui m’a le plus charmée c’est l’écriture, une écriture d’une beauté indicible.
Et, si au départ j’ai noté des passages, je me suis vite arrêtée, j’étais en train de recopier le livre. Ce roman est une suite de mots choisis, harmonieux, d’une élégance rare. Corinne Royer réussit même à glisser des mots inconnus et visiblement surranés, absents du « Petit Larousse » comme blèche, trouvé dans le « Littré ». « Pourtant, ce jour-là, lorsqu’il fait asseoir Louisa sur le petit canapé BLÈCHE au centre de l’atelier, les mouvements aériens de son corps s’amorcent aisément autour de la toile encore nue ». Les phrases sont léchées, extrêmement travaillées et musicales : un régal.
J’ai aimé le rythme induit par le tressage des mots, la fluidité, la beauté des expressions. J’ai beaucoup aimé aussi les passages qui font référence à la musique ou encore à la peinture, tel l’Outrenoir de Soulages. En un mot, j’ai tout aimé et même plus.
Un roman d’une beauté éblouissante. A découvrir.
Editeur : Actes Sud
Date de Parution : 2 Janvier 2019
Nombre de Pages : 272
Idem pour la prise de notes… 😉