C’est une histoire, belle, belle, belle, avec des personnages beaux, beaux, beaux, et des hasards encore plus, des rencontres inattendues et des amitiés improbables. Yacine, excellent élève qui connaît les lettres et les mathématiques, quitte son village du Sénégal à 13 ans pour rejoindre Saint-Louis. Il a en poche des lettres de recommandation à l’attention de Jean-Gabriel Pelletan de Camplong, directeur de la Compagnie royale du Sénégal. Yacine ne reste pas longtemps seul car sa route croise celle d’un lionceau abandonné qu’il prend sous son aile. Et comme il a lu Homère, il décide de lui donner le nom de Kena, c’est-à-dire Personne dans la langue de sa tribu.

L’auteur a un véritable talent de conteur et son écriture m’a emportée.

Des mots délicieusement surannés, des phrases brillamment tournées, des expressions mélodieuses chantent à l’oreille et entraînent le lecteur – en tous les cas m’ont entrainée – derrière Personne et Hercule, son sien acolyte, à travers le Sénégal, la France et même dans les sales et sombres soutes du bateau qui les y amène. Je n’ai pas cessé de penser à Saint-Simon en lisant ce roman : un comble pour quelqu’un qui se refuse aux comparaisons. Mais cette langue est si belle qui sert à merveille un récit d’une grande richesse sur nombre de sujets. Car, mine de rien et par un lion interposé, il est question de racisme, d’esclavage, d’histoire. On y croise des personnages fantastiques tels Buffon ou encore Bernardin de Saint-Pierre.

Véritable fable où le lion devient un enjeu, Stéphane Audéguy déploie des trésors de puissance, d’érudition, de préciosité pour nous rappeler, de belle manière, un sombre épisode de notre histoire.

Remarquable roman.

 

Editeur : Seuil
Date de parution : 18 Août 2016
Nombre de pages : 224